Un article de Martine Arpin
Lucy Calkins affirme ceci : « La seule chose dont on peut être certain lors d’un atelier d’écriture, c’est qu’il y aura des problèmes » .
En effet, nous travaillons avec de jeunes enfants. Même en sixième année ils sont, après tout, de jeunes enfants. Lors des ateliers d’écriture, nous leur demandons d’être autonomes et responsables de leur apprentissage. Nous leur demandons un travail cognitif et émotionnel exigeant. Nos élèves sont en apprentissage, il est donc tout à fait normal que certaines interventions soient nécessaires pour les soutenir.
L’un des problèmes qui surviendra assurément dans toutes les classes, qui survient chaque année dans la mienne en tout cas, c’est le manque d’idées. Même si au début d’un module on enseigne certaines stratégies pour trouver des idées, il y aura quand même toujours des élèves qui n’en ont pas (ou qui pensent qu’ils n’en ont pas…).
Voici quelques trucs pour générer des idées en groupe, en petit groupe ou lors d’entretiens individuels :
- S’assurer que les stratégies que nous enseignons soient transférables : Notre premier réflexe pourrait être de donner des idées à l’enfant qui n’en a pas. C’est possible de le faire, il sera engagé plus rapidement dans l’écriture, mais le problème reviendra assurément au prochain texte, puis aux suivants… Quand nos interventions sont assez spécifiques pour soutenir l’éclosion d’idées mais assez générales pour que la stratégie puisse s’appliquer à différents textes, et, encore mieux, à différents genres littéraires, alors on s’assure que notre enseignement soit transférable.
Voici trois façons intéressantes de générer des idées avec les élèves de façon transférable. Ils peuvent ensuite placer leurs dessins dans le dossier d’écriture pour consultation future :
Pense à…

On peut aussi aller plus loin dans le « Pense à… », tel que le suggère l’autrice et illustratrice Marianne Dubuc: « Ma façon de débloquer, des fois, c’est de penser à un événement, un moment où j’ai ressenti une émotion TRÈS forte. Les idées viennent plus vite. » Je m’imagine facilement la portée de nos paroles lorsqu’on cite des auteurs que les élèves lisent et admirent. Les rencontres d’auteurs avec les élèves sont d’ailleurs une excellente façon de rendre concret le processus d’écriture et de donner du poids aux stratégies enseignées. « Si Marianne Dubuc le fait… » 😉
Rayon X: « Moi! »

Faire une carte

2. Favoriser les idées personnelles qui célèbrent l’identité
L’écriture est un excellent véhicule pour exprimer et affirmer son identité. Quand on veut générer des idées, on peut donc inviter les élèves à célébrer leur identité et à l’utiliser dans leur écriture. Quand nous faisons une démonstration, on doit porter une attention spéciale aux idées que nous présentons. Comme on demande à nos élèves de le faire, nous devons être plus braves dans nos textes: ne pas se présenter toujours sous notre meilleur jour! Nous ne sommes pas toujours joyeuse, ou parfaite. Utilisons nous-mêmes nos identités pour trouver des idées.

3. Générer plusieurs idées à la fois puis choisir.
Générer des idées est difficile! Plus les élèves sont jeunes, plus la quantité de texte qu’ils écrivent est grande. C’est important, parce qu’il passent souvent à travers le processus d’écriture pour l’intégrer, alors ils ont besoin de beaucoup d’idées! Aussi, générer plusieurs idées à la fois permet d’être mieux préparé à écrire. Cela permet aussi de devenir intentionnel dans ses choix d’écriture. Ils deviendront des auteurs qui choisissent leurs sujet dans un ordre déterminé, au lieu d’être des auteurs qui ne font que prendre la première idée et essayer d’écrire à ce sujet. Comment?
- Faire un jeu.
On peut cacher les stratégies enseignées sous des post-it numérotés. Un élève nomme un chiffre, puis donne une idée selon la stratégie qui s’y cache. Les autres élèves notent leurs propres idées, ou la partagent avec leur partenaire oralement.

- Des livres en banque!
On pourrait demander aux élèves de préparer cinq pages couvertures. De cette façon, les idées sont déjà là pour plusieurs textes. (J’essaierai cette stratégie au début du module des Petits moments cette année!)
4. Semer de petites graines
Dans Les histoires de Raffi (Abby Hanlon, éditions d’Eux), l’enseignante répète : « Les histoires sont partout! ». C’est vrai qu’on l’affirme souvent, lors des ateliers d’écriture. Mais il ne suffit pas de l’affirmer. Il faut aussi prendre le temps de montrer aux élèves que c’est vrai, tout au long de la journée, de la semaine. Porter à leur attention les petits moments qui surviennent et qui feraient de bonnes histoires, qui peuvent devenir un sujet d’écriture : une compote renversée, un conflit à la récréation, gagner (ou perdre…) à un jeu de cartes, l’abeille autour de nous à la récréation, manquer son autobus, prendre l’autobus pour la première fois… Cela leur permet de vivre comme des auteurs, qui puisent des idées dans les petits événements du quotidien, dans leur vie et celles qui les entourent.


Peu importe le problème, quand on sait que ce sera un problème, alors mieux vaut s’y préparer puisque nous savons que nous devrons intervenir. Que ce soit pour soutenir les élèves qui ne savent pas encore trouver des idées d’écriture, ou pour tout autous serons ainsi plus efficace dans nos interventions et pour les rétroactions aux élèves lors des entretiens ou de l’enseignement en petit groupe. Discuter avec des collègues des problèmes qui surviennent lors des ateliers d’écriture et se préparer ensemble à y faire face de différentes façons en partageant nos expériences est assurément un bon moyen de trouver des solutions…
Quels autres problèmes risquent de survenir lors de vos ateliers d’écriture cette année? Comment pouvez-vous vous y préparer? Avec qui?
Idées inspirées d’un atelier avec Sara Berg, TCRWP, mars 2021.