En cette fin d’année qui nous attend, juste là, l’heure est évidemment aux bilans.
Face à la complexité de la tâche, comment s’assurer que celle-ci ne se transforme pas en lourdeur. Il y a plusieurs aspects sur lesquels nous n’avons pas de pouvoir, mais le pouvoir le plus puissant que nous avons est notre attitude, notre perception et nos choix pédagogiques.
L’une des phrases que je répète le plus souvent dans ma vie est « Ça, c’est le bonheur! » J’aime apprécier et profiter de tous les petits instants qui me rendent heureuses.
Mon bilan cette année se résume donc à une question.
Dans ma classe, dans mon travail, qu’est-ce qui me rend heureuse?
Pourquoi, malgré la complexité, je ne ferais pas autre chose?
Voici une courte liste pour cette année qui s’achève:
Entendre C. et V., des partenaires, discuter de stratégies d’écriture.

Que S. apporte un livre de sa maison pour le prêter à Y. parce qu’il connait ses goûts.
Voir de plus en plus les stratégies que j’enseigne dans les textes de mes élèves. De tous les élèves. À leur façon, à hauteur d’enfant, à leur rythme.
Que S. et L. règlent un conflit ou parlent de leurs émotions en faisant référence aux personnages d’un album que nous avons lu.
Travailler avec des collègues positives, engagées et inspirantes. Savoir que nous sommes là l’une pour l’autre peu importe ce qui arrive.
Que S. soit passée de « l’écriture inventée de fausses lettres attachées d’adulte » à l’écriture, quoi qu’ardue, de 5 ou 6 phrases lisibles, en 20 mois.
Qu’après quelques entrevues de parents, V. souligne l’importance dans notre vie de la gentillesse et des relations humaines comme point commun entre toutes les entrevues. Q’on ait parlé d’électricité, de service à la clientèle, de relations d’aide, de débosselage ou de cuisine. Du Sri Lanka, du Chili, de l’Italie ou de la Russie. À 8 ans, c’est ce qu’il retient!
Recevoir des photos d’E. qui lit et écrit à la maison collée sur son chien.
Que G. me fasse assez confiance pour me nommer ce qui lui pose problème dans son texte et me demande mon aide.
Que J. ose, fasse des tentatives, même si l’orthographe est difficile, et qu’il utilise les outils à sa disposition pour corriger ses textes. Qu’il accepte maintenant que tout ne peut pas être parfait.
Rencontrer d’autres enseignants passionnés et passionnants pour échanger et partager notre bonheur.
Voir la fierté des élèves qui présentent leurs textes aux autres, que ce soit dans la classe, dans l’école ou dans la communauté.
Entendre les discussions d’un club de lecture au sujet des éléments récurrents dans une série qui leur permettent de prédire le déroulement de l’histoire.

Constater que des élèves de 8 ans peuvent faire des choix éclairés et adéquats pour leur lecture personnelle.

Voir l’impact de mon enseignement sur les compétences en lecture et en écriture.
Voir l’impact de mes choix pédagogiques sur l’amour de la lecture et de l’écriture.
…
Malgré ce qu’on entend souvent, je considère aussi qu’il n’y a pas de profession où on reçoit autant d’amour et de reconnaissance au quotidien. C’est une question de perception.
En amorçant la prochaine année scolaire, je veux me rappeler ce qui me rend heureuse, et faire en sorte que mes choix pédagogiques, mon langage et mes attitudes en classe provoquent ces étincelles qui rejaillissent autant sur les élèves que sur moi.
