Un article de Diane Bernier-Ouellette

Dans les écoles françaises de ma province, c’est devenu une tradition : nous célébrons nos jeunes auteurs. La célébration des auteurs c’est un évènement annuel dans le cadre duquel tous les élèves de l’école se rassemblent afin de partager leurs progrès et leurs « meilleurs textes de l’année».

L’idée est venue il y a une dizaine d’années, à un moment où nous avions remarqué que tous travaillaient très fort à implanter un programme de littératie complet, mais que nous avions négligé de célébrer nos efforts et ceux des enfants.

Cette fête fait partie de la culture maintenant et les écoles placent l’évènement au calendrier dès le début de l’année, au même titre que les sorties de fin d’année, les célébrations sportives et musicales, les collations de diplômes. En autres mots, nous en faisons une priorité.

Puisque ça se passe normalement dans les dernières journées de juin, le tout a comme conséquence de garder les élèves engagés, même lorsque le beau temps et la promesse des journées de plage viennent les distraire!

Le processus menant à une célébration et le déroulement typique de la célébration ressemblent à ceci :

1. Au cours de l’année, les enseignants et les élèves décident ensemble comment ils choisiront les textes qu’ils partageront à la célébration et débutent le processus de collection de textes.

Même si les détails varient d’une enseignante à l’autre, chaque élève de chaque classe aura soit préparé une compilation de ses « meilleurs textes » ou bien ils présenteront des textes dans un genre qu’ils affectionnent particulièrement.

Par exemple, en première année, il se pourrait que les élèves transcrivent deux ou trois de leurs textes préférés dans un livre blanc cartonné tandis qu’en 5e année, il se peut qu’ils préservent les bandes dessinées qu’ils viennent de terminer puisque c’est un genre à l’étude. D’autres encore pourraient choisir de montrer un texte du début de l’année, de la mi-année et de la fin de l’année afin d’illustrer leurs progrès.

2. La veille de la célébration, tous ces textes sont étalés sur des tables, au mur ou sur des présentoirs au gymnase, par niveau scolaire. On y ajoute un décor : des fleurs, des ballons pour agrémenter le tout. J’aime que certaines classes placent une affiche à côté de leur table intitulée : Voici ce que nous avons appris comme auteurs cette année!

 

3. Le jour de la célébration, qui dure normalement un avant-midi, débute par un rassemblement où un membre de la direction scolaire accueille tous les élèves le personnel enseignant et explique le déroulement.

4. Ensuite débute la lecture en groupes hétérogènes de 3 à 5 élèves. À ce moment-là les élèves se rassemblent en groupes préalablement établis (ex : les élèves de maternelle à 2e année se lisent leurs textes, ceux de 3e à 5e, ceux de 6e à 8e).

Visuellement ça ressemble à des petites ilots d’élèves assis en cercle un peu partout : dans le gymnase, dans le long corridor qui longe l’école, dans des classes.

Les élèves plus âgés se lisent des extraits tandis que les plus jeunes lisent leur texte en entier. Les enseignants circulent, joignent des groupes. Nous entendons des « ah! », des fous rires! Nous voyons des auteurs qui se tapent sur l’épaule, des sourires de fierté. Ceci constitue vraiment le grand but de l’activité : lire à un auditoire.

5. Après cela nous effectuons deux autres rotations d’équipes. À chaque fois, nous invitons les élèves qui écoutent, à dire à l’auteur ce qu’ils ont particulièrement aimé.

6. Nous terminons cette période de lecture/partage en remettant les textes sur les tables et nous laissons les élèves libres de circuler et de lire ce que bon leur semble peu importe le niveau scolaire.

 

7. Juste avant la pause, il y a un ou une invitée, habituellement quelqu’un de la communauté qui écrit, qui parle de ses techniques et des auteurs qui l’inspirent.

Au cours des années nous avons reçu : le concierge qui est poète et chansonnier, la journaliste de notre hebdomadaire, un historien qui publie, une enseignante qui envoie ses manuscrits aux maisons d’édition. Une année, dans mon rôle de mentor, j’ai enregistré des propos de 3 auteurs populaires qui ont assisté à notre Salon du livre et à partir de cela j’ai monté une présentation sur « Comment les auteurs trouvent leurs idées!»

8. Après l’invité, c’est la collation et la récré.

9. En revenant de la récré, les parents nous rejoignent au gymnase. À ce moment-là, les élèves lisent leurs textes aux parents et aux grands-parents. Il y a des papillons adhésifs où tous ces invités peuvent laisser des commentaires et bien sûr les élèves peuvent s’écrire des mots d’encouragement.

10. Nous terminons par un mot de la direction, la chorale nous invite à chanter la chanson thème, on se dit « À l’année prochaine! » Puis c’est le barbecue de fin d’année, alors les familles dinent ensemble.

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Les modules d’écriture nous ont enseigné l’importance de célébrer tout au long de l’année après chacun des modules. Cette pratique est importante car elle permet aux élèves de réfléchir aux buts atteints ainsi qu’à verbaliser les prochains buts tout au long de l’année, de ne pas oublier qu’ils écrivent pour un auditoire. Ces célébrations contribuent à solidifier la communauté d’auteurs au niveau de la classe.

Nous croyons qu’il est toujours de mise de poursuivre notre célébration à la fin de l’année scolaire, qui constitue une cumulation de tous nos efforts. Celle-ci a une « différente saveur », plus grandiose. L’auditoire est plus large. Les petits ont la chance de voir ce qui s’en vient en côtoyant les grands de l’école. Les plus vieux remarquent combien ils ont évolué au fil des ans. Les enseignants discutent, constatent de quelle façon leurs anciens élèves ont grandi comme auteurs.

Je sais que notre travail inspiré des modules contribuera à renforcer l’alignement, à nous rendre tous, petits et grands, plus précis lors de nos rétroactions : à nommer les procédés littéraires dans les textes des élèves, à choisir des buts personnels d’élèves et d’école plus ambitieux.

Une fois par année de rassembler tous les élèves de l’école, leurs parents, la communauté autour de l’écriture (et par le fait même, la lecture), c’est tout simplement magique. Ah oui … en contexte linguistique minoritaire c’est la survie de la langue qui se transmet de génération en génération que nous célébrons en même temps!