Un article de Martine Arpin

L’avantage des modules d’ateliers d’écriture ou de lecture publiés, c’est que des experts qui connaissent la didactique et l’écriture ont créé des séquences d’enseignement intentionnelles et réfléchies pour aider les élèves à devenir plus compétents et avides d’écrire, de partager leurs vies, de communiquer par l’écrit. Combinés à un programme de littératie complet, incluant du travail quotidien sur la langue et les mots, ils sont un outil clé en main parfait, nous permettant de suivre le rythme d’apprentissage de chacun, peu importe notre programme d’étude. On y travaille différents genres littéraires. L’écriture narrative, informative, les textes d’opinion, la poésie n’ont plus de secrets grâce à ces outils.

Cette année, en deuxième année, j’ai déjà travaillé en septembre le texte narratif à partir d’un nouveau module qui s’inspire des Petits moments. Comme j’aime travailler l’écriture narrative plus d’une fois dans l’année, parce que c’est un genre important mais aussi parce que les aptitudes des élèves changent beaucoup en cours d’année, j’ai décidé de créer un module hybride à travailler en février. J’ai utilisé les modules Écrire des séries d’histoires réalistes et S’inspirer des grands auteurs pour écrire pour proposer un module d’écriture narrative sur mesure pour mes élèves. On s’inspire des grands auteurs pour écrire des séries à partir de nos personnages préférés. Les élèves doivent créer un personnage (humain ou animal, mais à personnification humaine), de leur âge, à qui il arrive des problèmes/aventures/émotions fortes réalistes dans une série de deux (certains écrivent déjà des textes très élaborés!) livres ou plus.

Le même exercice pourrait être fait si vous voulez travailler un genre littéraire particulier et qu’il n’y a pas de module déjà créé pour celui-ci. Par exemple, on pourrait travailler le style journalistique pour créer un journal de classe, ou même créer un module « évaluation du ministère » ou « examen de fin d’année » pour enfin arrêter de se mettre la pression d’enseigner pendant un cycle de deux ans en fonction du fameux test et plutôt utiliser abondamment les ateliers d’écriture pour donner les outils aux élèves pour développer leur compétence à l’écrit et leur motivation à écrire,  mais aussi leur montrer « la recette » pour réussir un examen d’écriture formel sans en faire des cauchemars.

Comment faire un module d’écriture…

Il faut d’abord se demander si notre idée vaut la peine d’investir du temps de conception et d’y consacrer cinq à six semaines d’enseignement et de travail en classe. Parfois, il suffit d’inclure une ou deux leçons dans un module que nous utilisons déjà. Par exemple, le texte descriptif est prescrit au programme. Autant les textes narratifs, informatifs qu’argumentatifs comprennent des descriptions et sont enrichis par elles. La description est un procédé utile et important dans chacun des grands genres. Alors plutôt qu’en faire un module, pourquoi ne pas intégrer plus de leçons, si on pense qu’elles ne sont pas suffisantes pour nos élèves, dans chacun des modules de l’année?  

On doit aussi se demander si les habiletés que les élèves développeront dans le module créé sont importantes pour eux, pour leur apprentissage de l’écriture. Est-ce que le module créé s’harmonise avec ce qui a été enseigné avant et ce qui sera enseigné après en écriture, dans ce même genre littéraire et dans les autres genres? Le travail effectué sera-t-il transférable à d’autres textes, à d’autres genres littéraires, dans d’autres matières?

  1. Étudier

Quand on est convaincu.e que notre idée vaut la peine de s’y pencher, il faut alors commencer à étudier le genre de texte que nous voulons enseigner. Je veux travailler l’article journalistique avec mes élèves et créer un journal scolaire? Alors je vais étudier des articles de journalistes que j’admire et que j’aime lire. Rassembler des textes, en dégager les caractéristiques, se demander ce qu’ils font, comment et pourquoi. Trouver des constantes.

On peut commencer par regarder ce qui nous plait dans le texte que nous étudions, puis essayer de nommer les procédés. On essaie de trouver d’autres exemples, de dégager une façon de faire et de comprendre l’effet.  Nous pouvons ensuite choisir deux ou trois de ces textes qui serviront de textes modèles tout au long du module selon ce que nous voulons enseigner.

2. Penser au processus d’écriture

Ensuite, nous devons réfléchir à chaque étape du processus d’écriture, selon le moment de l’année et le niveau des élèves.

De quelles leçons les élèves ont-ils besoin pour apprendre à trouver des idées?

Pour planifier?

Pour écrire et réviser (les procédés)?

Pour corriger?

Combien de textes seront produits, environ, par les élèves? Combien de fois passeront-ils à travers du processus?

3. Écrire une liste de points d’enseignement

Puis, nous devons dresser une liste des points d’enseignement possibles qui deviendront soit des mini-leçons, des enseignements de mi-atelier ou des sujets de mise en commun. Certains seront aussi assurément abandonnés en cours de route. Nous devons construire une séquence logique qui respecte le processus d’écriture et qui inclue de la répétition.  Peut-être que certaines leçons des modules existants peuvent simplement être reprises ici? Pourquoi tout inventer… S’inspirer des modules que nous connaissons bien nous aidera à élaborer notre propre module.

4. Écrire

Et pour moi, l’étape la plus importante dans l’élaboration d’une séquence d’enseignement de l’écriture, même si elle n’est pas naturelle pour la plupart (comme pour nos élèves…), LA chose que nous devrions faire même lorsqu’on aborde un module déjà créé, mais encore plus nécessaire quand on veut en élaborer un, c’est d’écrire soi-même quelques textes du genre, pour comprendre le processus et le genre. S’observer en tant qu’auteur permet aussi de valider une certaine séquence et de prévoir les défis.  En plus de nous permettre de vraiment comprendre ce par quoi passeront nos élèves, ces textes deviendront des outils et des exemples pour notre module. Nous pourrons en effet utiliser ces textes, ou une partie, comme textes modèles avec nos élèves.

5. Paufiner

Il faudra penser aussi à une foule de petits détails essentiels pour un déroulement efficace de l’atelier :  les tableaux d’ancrage, une idée de texte de classe à écrire avec les élèves (très utile lors de l’engagement actif), réfléchir aux entretiens qui pourraient soutenir les élèves, aux outils comme les listes de vérification…

6 (ou 1!). S’entourer

Finalement (ou peut-être même d’abord),  il faut chercher des complices! Est-ce que des collègues ont envie de s’y pencher avec moi? À deux, trois ou quatre, les idées se multiplient et les réflexions s’enrichissent.

Les modules d’ateliers d’écriture ont été pour moi, comme pour plusieurs enseignant.e.s que je côtoie, l’image concrète de ce que l’enseignement de l’écriture pouvait être, la démonstration d’un enseignement d’une qualité sans pareille. La source de contenus qu’il m’était impossible d’enseigner « avant », parce que je ne les connaissais tout simplement pas. Qu’ils deviennent aujourd’hui une source d’inspiration pour créer des séquences d’enseignement me réjouis. Quand Benjamin, vendredi dernier, m’a lancé: « Quoi, il n’y a pas d’atelier d’écriture aujourd’hui? C’est parce que Max (son personnage) est tombé du mur d’escalade hier, je pensais l’aider aujourd’hui à régler son problème! », que Zoé a dit à Florence qu’elle aimerait que Charlotte (son personnage) soit dans notre classe, et que lors de la leçon de grammaire sur les adjectifs, Kyle a voulu ajouter deux caractéristiques à son personnage pour préciser sa personnalité, j’ai compris que les élèves étaient aussi emballés que moi par ce module qui, après tout, a été pensé et créé pour eux, pour répondre à leurs besoins. Et ça, ça fait ma journée!

Exemples de classe :

Réflexion sur le personnage de ma série : Je le connais comme s’il était mon meilleur ami!

Et

Planifier une série d’aventures pour mon personnage préféré