Un article d’Isabelle Robert
Travailler avec un partenaire demande des habiletés humaines importantes. Ça ne demande rien de moins qu’une ouverture sur le monde. Une ouverture sur ce que les autres ont à dire. C’est avoir le souci de vouloir aider et d’être attentif aux besoins. C’est savoir poser les bonnes questions et savoir écouter…
Le partenaire d’écriture est le premier lecteur de l’auteur. Souvent, l’auteur écrit en pensant à lui. « Est-ce que mon partenaire pourra lire mon texte facilement? Est-ce qu’il va bien comprendre ce que je veux dire? Est-ce que mon texte aura l’effet que je souhaite sur le lecteur? … » Le partenaire fait donc partie des ressources de l’auteur pour tester, clarifier, recevoir des conseils ou toute autre rétroaction…
Et quand je vois deux élèves de six ans qui se parlent d’écriture avec un sérieux et un engagement si grand que ça donne des frissons, je me dis que je dois continuer de travailler fort à développer ces habiletés chez les élèves. Ce sont de grands moments qui permettent aux deux membres du tandem de grandir en tant qu’auteurs.
Donc, un de mes plus grands défis dans l’atelier d’écriture est de rendre le temps des échanges entre les partenaires d’écriture efficace et bénéfique pour chacun d’eux. Certes, je dois créer plusieurs occasions de le faire, car c’est dans la pratique qu’on devient meilleur, mais aussi parce que la relation de partenariat s’enrichit et la confiance entre les membres de l’équipe se solidifie.
Montrer comment être un bon partenaire fait donc partie de mon enseignement. Je l’enseigne explicitement et les élèves doivent comprendre le rôle important qu’ils ont. Être un bon partenaire est une responsabilité. Il faut que l’élève comprenne que ce qu’il est, en tant que partenaire, est important pour l’autre.
Une foule de petits gestes sont enseignés :
- S’assoir « genoux à genoux » et « yeux dans les yeux » pour qu’ils se regardent l’un et l’autre lorsqu’ils se parlent ;
- S’assoir « épaule à épaule » et mettre le texte au centre lorsqu’ils veulent le lire;
- Hocher la tête pour signifier que l’on comprend ce que le partenaire dit;
- Se faire des rappels comme parler tout bas, s’installer rapidement, utiliser les outils de travail, recourir une stratégie apprise;
- Poser des questions;
- …
Et des conversations sont guidées (chacun des partenaires a un rôle précis) :
- Pratiquer l’écoute active en mettant le texte au milieu du tamdem(et en tenant chacun son côté de feuille!!!). L’auteur du texte le lit de son mieux avec sa voix expressive. Le partenaire écoute attentivement, et ensuite, il fait le rappel de l’histoire. Et l’équipe est ainsi en mesure de voir si le texte est cohérent.
- Offrir un répertoire de début de phrases pour orienter la conversation. Par exemple : « J’ai remarqué que… », « Je me demande si… », « J’ai aimé quand tu as fait… », « Je ne suis pas certain de comprendre ce que tu veux dire quand… ». « Ton histoire me fait penser à… », « Ton histoire me rend… »
Il faut enseigner à faire ressortir des éléments précis du texte, à pointer l’endroit dans le texte qui supporte le commentaire qu’ils font. On y va graduellement, on modélise, on invite la classe à regarder une bonne conversation d’équipe, on ajoute de plus en plus de possibilités de conversations sur le répertoire.
- Enseigner à utiliser la liste de vérification et les différents tableaux d’ancrage disponibles pour faire de la rétroaction. « Dans ton texte, j’ai remarqué que tu fais très bien… » « Tu pourrais peut être essayer de… »
- Enseigner à trouver des endroits dans le texte où l’auteur pourrait en dire plus. «Ici, peux-tu donner des détails? » « J’aimerais en savoir plus sur… », « As-tu des exemples pour…?» Ils peuvent le faire oralement ou utiliser des papillons adhésifs pour écrire les commentaires directement sur le texte. Fournir un répertoire de questions aux élèves : quand on veut en savoir plus, on peut dire…
- Enseigner à planifier avec son partenaire. Partenaire 1 raconte à voix haute l’histoire qu’il veut écrire. Partenaire 2 écoute et pose des questions. Ensuite, partenaire 1 raconte à nouveau son histoire avec plus de détails. Partenaire 2 écoute et pose encore des questions pour avoir plus de détails. Pour finir, partenaire 1 raconte une troisième fois son histoire avec toutes les précisions et il est prêt à travailler seul.
- Préciser comment et quand faire appel au partenaire durant la période d’écriture. Y a-t-il un coin de conversation dans la classe pour les partenaires? Parfois, ce n’est pas nécessaire… particulièrement si les partenaires travaillent côte à côte à une table. Dans quel contexte puis-je faire appel à mon partenaire? Toutes ces questions peuvent faire partie d’un enseignement précis.
- …
Chaque auteur a besoin d’un premier lecteur, d’un regard extérieur, de quelqu’un qui l’amènera plus loin… Ce sera quelqu’un en qui il a confiance et qui l’inspirera. Créer des partenariats durables et efficaces demande temps et énergie, car ce sont des enfants. Il faut leur montrer. Mais quand on reconnait l’importance de ces tandems dans l’apprentissage, la motivation et l’engagement des élèves, on ne peut pas passer à côté!
Voici des tableaux d’ancrage qui peuvent vous inspirer :