Dans la classe d’Isabelle

Depuis deux semaines, mes élèves et moi sommes engagés dans une posture de lecteurs curieux d’apprendre de nouvelles connaissances et d’auteurs experts de divers sujets. Dès le premier atelier de lecture du module de 2e année, Devenir des experts en lisant des documentaires[1], on nous amène à observer les détails de différents objets ou graphiques (cartes géographiques, schémas, feuilles d’arbres, plumes, minéraux…) pour ensuite discuter de ce que nous remarquons, des apprentissages que nous faisons et de ce qui nous questionne. Quoi de mieux pour développer la curiosité des élèves que de prendre cette posture de chercheurs et de scientifiques. C’est dans cet esprit que nous vivrons ces prochaines semaines.

L’environnement de la classe s’est donc transformé. Nous avons créé un espace à proximité de nous pour disposer des objets à observer. On ne pouvait pas ranger ce matériel trop loin, l’envie de découvrir tous ces objets était trop grande. Ce travail d’observation proposé à la première leçon du module est si captivant que nous avons répété l’expérience avec de nouveaux objets à observer. Certains élèves en ont même apporté de la maison et ont partagé leurs connaissances avant de les mettre dans notre coin des curiosités.

Nous avons aussi revu le classement de nos livres documentaires. Un certain classement avait déjà été fait par les élèves au début de l’année. Des livres classés par thèmes plus généraux tels que les moyens de transport, les animaux de compagnie, la santé, l’univers, les animaux de la ferme, les sports, etc. D’autres, classés par collections : Les petits dégoutants, Débutant Usborne, National Geographic… ou encore, par auteurs :  Camilla de la Bédoyère, Bernadette Gervais… Mais cette fois-ci, on s’est trouvé des catégories plus captivantes : Les créatures fantastiques, Prédateurs féroces, Endroits rêvés, Il faut les protéger, Le monde sous-terrain, Fantastiques nageurs, Les petites bêtes qui font peur, etc. Des sujets tellement plus invitants. Les élèves ont été amenés à sélectionner des livres de notre bibliothèque de documentaires pour les classer à nouveau. Ils devaient réfléchir et déterminer quels sont les livres qui pourraient faire partie de nos nouvelles catégories.

Plus les occasions de manipuler les livres sont fréquentes, plus les élèves les connaissant et les retrouvent facilement. Si l’un d’eux dit à la classe : « Je cherche le livre de Bernadette sur les champignons. », il y a presque toujours un élève qui va lui répondre : « Oh, je l’ai vu dans cette section! » ou « Je l’ai! Je te le prête après? »

Notre nouvelle posture de chercheurs et de scientifiques a amené les élèves à ajuster le contenu dans leurs bacs de lecture. Ils tentent d’avoir autant de textes informatifs que de textes narratifs. En deuxième année, ils parviennent à bien distinguer les deux genres et s’assurent d’avoir tout ce qu’il faut pour combler leurs besoins de la semaine.

Évidemment, les documentaires sont aussi les grandes vedettes de la lecture à voix haute. C’est une autre occasion de montrer à quel point le monde est fascinant. J’ai choisi les documentaires suivants pour les premières lectures à voix haute du module : Les tempêtes, de Myriam Bush Goin et Des chauves-souris effrayantes, mais intéressantes, de Tracy Nelson Maurer. Lire des documentaires à voix haute demande plus de temps que lire des histoires. On s’arrête souvent pour réfléchir, pour s’assurer que l’on comprend, pour faire des liens avec nos connaissances, pour réagir à ce qu’on vient de lire et pour célébrer le fait d’avoir de nouvelles connaissances sur le monde. Les occasions de discuter sont nombreuses et les opportunités sont grandes pour s’approprier le nouveau vocabulaire.

Une pratique intéressante pour maintenir notre niveau de curiosité est de tenir un journal afin de noter les informations qu’on ne veut pas oublier. Depuis la fin de la première année, les élèves possèdent un petit cahier que l’on a appelé Carnet scientifique. Les premières notes qui ont été prises dans leur carnet (à la fin de la 1re année) l’ont été à partir de l’écoute de courts documentaires trouvés sur le web. Les élèves ont appris à faire des croquis, des listes, des étiquettes et des flèches, et à résumer une idée en une phrase, car je modélisais des façons variées de garder des traces de nos apprentissages. Depuis, certains élèves ont développé l’habitude de noter dans leur carnet les informations qu’ils trouvent intéressantes lorsqu’ils lisent un documentaire. Ces temps-ci, ils éprouvent beaucoup de plaisir (et de sérieux!) à noter les observations qu’ils font de différents objets.

Et pourquoi ne pas s’inspirer de ce travail scientifique pour en faire un projet d’arts plastiques ? Cette habileté à observer les détails d’un objet a permis aux élèves de réaliser une œuvre à la fois artistique et scientifique. On a planifié ensemble les étapes, le matériel et le temps. Ces œuvres sont maintenant installées dans les corridors de l’école afin de partager nos connaissances avec les autres.

Ces idées vous inspireront surement d’autres idées. Notre quotidien et les intérêts des élèves font souvent en sorte que certains sujets sont plus approfondis que prévu ou que d’autres projets qui n’étaient pas planifiés se réalisent. La classe, c’est eux après tout.

Il est possible de vivre les mêmes modules en variant peu les activités quotidiennes et en faisant moins de transformations dans la classe, mais en immergeant les élèves dans le genre de cette façon, je remarque un plus fort engagement de leur part. J’observe un grand enthousiasme autant pour la lecture que pour l’écriture de documentaires (à propos d’un sujet qu’ils connaissent et qu’ils aiment) ainsi que dans leurs conversations sur divers sujets. Et j’adore voir et entendre des élèves curieux sur le monde qui les entoure!


[1] https://www.cheneliere.ca/fr/devenir-experts-lisant-documentaires-9782765077312.html